La Marine nationale retrouve ses petits mousses
Futurs mousses de la Marine Nationale, 150 jeunes ont fait leurs premiers pas, hier, dans le Centre d'instruction naval de Brest.
Jérôme Fouquet
Fermée voilà 30 ans, l'École des mousses de Brest a rouvert ses portes, lundi. Cent cinquante
garçons et filles, de 16 et 17 ans, y débutent leur formation. Dans un an, ils
seront marins et militaires.
Il y a de l'humide et de la gorge nouée. Chez ces 126 garçons et
24 filles, venus de toute la France et même d'Outre-mer, gros sacs et valises
au pied. Chez leurs parents, bien intimidés sur cette grande place d'armes du
Centre d'instruction naval (CIN). Vingt-six hectares, bâtiments de granit d'un
gris plutôt austère, dominant le port de guerre et toute la rade bleue de
Brest. Mille élèves y sont accueillis, entre l'École navale, l'École de
maistrance, le lycée naval, les classes de prépa. Et à nouveau, désormais, les
mousses.
De la gorge nouée, il y a en aussi chez certains officiers. « C'est le grand
jour. Pour eux, il y aura un avant et un après. Je m'en souviens comme si
c'était hier... C'était en août 1973, j'avais 16 ans et une grosse boule au
ventre. Comme eux. » Depuis, le petit mousse Yves Cappellesso
a bien taillé sa route, le voici commandant d'une École des mousses
ressuscitée. Au milieu de toute cette émotion générale, ce capitaine de frégate
est le responsable de ces 150 gamins qu'il a un an pour transformer en vrais
marins, en mousses brevetés.
Promotion Frégate Thétis
Cette promotion du 14 septembre 2009 est baptisée Frégate Thétis, « du nom de
la frégate qui a accueilli la première promotion de l'École des mousses, en
1856 », rappelle le capitaine de vaisseau Bernard Riou,
commandant du CIN. C'est aussi la première promotion du XXIe siècle, puisque
l'école de Brest, unique en France, a fermé ses portes en 1988. La faute à la
lente érosion des effectifs, aux évolutions techniques. Mais le vent a tourné,
la Marine nationale est « très fière de rouvrir cette école qui vous donnera
l'esprit d'équipage ». Si fière que le ministre de la Défense lui-même, Hervé
Morin, sera là le 10 octobre, « pour vous confier la garde de votre drapeau ».
Un drapeau à la lourde histoire, trois Croix de guerre et une Légion d'honneur.
C'est avec lui qu'ils iront défiler, à Paris, pour le 14 juillet. Les jeunes
ouvrent des yeux ronds, ils ont vraiment changé d'univers... Rigueur militaire,
tout est préparé à leur nom : chambrées de quatre, casiers, tables de classes
dernier cri avec Internet, etc. Et puis il y a le gymnase, le cinéma, la
piscine et les foyers, suréquipés. L'armée a mis le paquet.
« Ils auront bien changé »
« Ils ont une chance terrible », apprécie le papa de Johnny, 16 ans, qui sort
de 3e à Crozon (Finistère). « Ce sont des enfants, complète la maman. Et dans
quinze jours, quand on les reverra à la première permission, ils auront bien
changé... » Ça ne fait pas peur à Aurélia, de Lyon, et Leïla, de Toulon, 16 ans
toutes les deux : « On n'est pas venues ici pour un an, on veut faire carrière
dans la Marine ! » Dans un an, ces 150 jeunes gens intégreront l'un des six
métiers qu'elle leur propose. Et les meilleurs seront soutenus pour passer un
bac pro avec le lycée maritime de Saint-Malo, « voie d'accès à la casquette, au
corps des officiers », glisse Bernard Riou.
La remise du bachi, c'est pour mercredi. Gréés avec
leur joli pompon rouge, ils auront alors droit au lever des couleurs, dès 8 h,
tous les jours. Mercredi, ce sera aussi le jour de sortie en ville, en uniforme
et en bon ordre. Il est 17 h, les parents s'en vont, les portes de cet internat
très particulier se referment.
Christophe VIOLETTE.